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vendredi 25 décembre 2015

LE SERVICE DE L’AUTORITE ET L’OBEISSANCE DES CONSACRES DANS LE CODE DE DROIT CANONIQUE (I)



De notre temps, il n’est pas aisé de parler de l’autorité et de l’obéissance qui s’y rattache. Nombreuses ont été des propositions des modèles de gouvernement ces dernières années : paternalisme, démocratie, anarchie, etc. Dans ces différents modèles, l’autorité et l’obéissance occupent une place de choix. Quel modèle alors prédomine chez les consacrés? Lequel est proposé par le Code de droit canonique? Comment le service de l’autorité et l’obéissance sont vécus par les consacrés et quels sont les défis auxquels ils sont confrontés? 

Dans les lignes suivantes nous tenterons d’apporter quelques pistes de compréhensions de ce sujet. D’abord, nous allons éclaircir quelques concepts clés y relatif. Nous aborderons ensuite la question de l’autorité et de l’obéissance dans le Code de droit canonique. Nous porterons, après et brièvement, un regard sur ce sujet dans les droits propres des instituts.  Enfin, nous aborderons les défis d’aujourd’hui et demain pour l’exercice de l’autorité et l’obéissance des consacrés. 

I. Des concepts pour l’exercice de l’autorité et l’obéissance des consacrés.

1. L’autorité. Ici, nous ne nous référons pas à l’autorité morale dont jouissent certaines personnes comme les chercheurs ayant obtenus le Prix Nobel dans un domaine scientifique. Cette autorité est souvent assimilée au prestige. En Droit, sans que l’autorité morale soit ignorée, nous entendons le pouvoir qui existe dans l’Eglise et que certaines institutions et personnes possèdent en vue de prendre des décisions qui engagent et obligent les sujets. Cette autorité est appelée, au sens strict, le pouvoir de régime ou de juridiction. Elle correspond à la fonction de gouvernement dans l’Eglise, au côté de la fonction d’enseignement et de sanctification. Ordinairement, elle s’exerce dans le for externe mais parfois, elle s’exerce aussi dans le for interne (c. 130). Le pouvoir de régime se divise en pouvoir législatif, exécutif ou administratif et judiciaire (c. 135). Les religieux clercs sont habiles à l’exercer alors que les religieux laïcs y peuvent coopérer selon le Droit (c. 129).

2. L’obéissance. L’obéissance est connue comme vertu annexe à celle de la justice. En tant que vertu cardinale ou morale, elle est une vertu acquise, ce qui suppose une recherche et un effort laborieux et constant pour l’atteindre et la conserver. Dans la vie consacrée, l’obéissance fait partie des conseils évangéliques et, par conséquent, objet de vœux à côté de la chasteté et de la pauvreté. Le consacré obéit par imitation du Christ qui s’est fait obéissant au Père jusqu’à la mort sur la croix (Phil 2, 7-8 ; Jn 4, 34 ; Rm 5, 19 ; etc.). Sa signification est de s’obliger à se soumettre à la volonté des supérieurs légitimes qui représentent à Dieu lorsqu’ils commandent quelque chose selon les constitutions. C’est cet aspect juridique et constitutif de l’état de consécration religieuse qui nous intéresse ici.

3. Le service. Le vocable service n’est pas univoque plutôt polysémique. En plus d’évoquer l’action de servir en position d’infériorité comme dans les travaux ménagers ou sous forme de courtoisie, il peut se comprendre comme une œuvre réalisé en vue de veiller à certains intérêts ou de satisfaire des besoins publics ou d’une entité publique ou privée. Ainsi, on parle du service au client, post-vente, service religieux, etc. Presque toujours, le service répond à un besoin dans une relation de deux entités ou personnes. Le service se présente ainsi comme quelque chose d’altruiste et bénéfique. Dans l’expression « service de l’autorité », on perçoit un adoucissement de la rigidité et la gravité que, par l’histoire, le mot autorité suscite. Par le service de l’autorité, celle-ci se montre par son aspect bénéfique pour l’institution ou la personne concernée. Nonobstant cet aspect romantique, la réalité évoquée est celle de « l’exercice du pouvoir », dans sa dimension bénéfique d’atteindre les objectifs communs. Le serviteur de l’autorité est aussi bénéficiaire des services rendus.

4. Les consacrés. Depuis la publication du Code de Droit canonique en 1983 par le saint Jean Paul II, l’usage du mot consacré est devenu plus populaire. Il englobe toutes les formes de vie consacrée existantes dans l’Eglise avec intention de s’obliger à la pratique des conseils évangéliques. A travers l’histoire, ces formes ont pris les noms de : ermites, vierges, moines, chanoines réguliers, ordres mendiants ou militaires, religieux de vœux simples, membres des instituts séculiers, laïcs consacrés, membres des sociétés de vie apostolique, membres de nouvelles formes de consécration, etc. Le terme « consacré » tend à regrouper toutes ces tendances. Etant donné la diversité des formes de consécration, l’exercice du pouvoir et l’obéissance qu’il implique est aussi varié selon la tradition et les normes communes ou propres qui régissent la famille donnée des consacrés. Le modèle de référence peut se trouver dans les familles historiques comme les moines ou les ordres religieux. En effet, dans ces familles, les membres professent le vœu d’obéissance et accepte de vivre dans une maison érigée par une autorité compétente, sous la direction d’un supérieur désigné conforme à la norme du Droit (CIC 83, cc. 573 ; 607-608).

5. Le Code de Droit canonique. Publié en 1983 par Jean Paul II, il est venu remplacer celui de 1917. Il est considéré comme le dernier document du Concile Vatican II. Le même Jean Paul II, lors de sa publication, il disait que le nouveau Code, dans un certain sens, peut être considéré comme un grand effort de traduire dans un langage canonique l’ecclésiologie conciliaire. On retrouve dans le Code actuel l’intégration d’une vision théologique et juridique de la réalité ecclésiale et, par conséquent, religieuse. La tension entre le théologique et le juridique ne suppose pas deux mondes irréconciliables mais des dimensions complémentaires de la même réalité. Pour les consacrés, le Code actuel est le droit de référence commune pour la constitution des normes particuliers (Constitutions, Directoires, normes propres, etc.). Par principe d’hiérarchie des normes, les normes particulières des consacrés ne peuvent pas contredire le Code de Droit canonique. 

6. La dynamique de l’autorité-obéissance. 

Entre l’exercice de l’autorité et la pratique de l’obéissance, il se produit une certaine énergie que nous qualifions de « dynamique ». Nous adoptons ce vocable en ce sens qu’il renvoie au mouvement, à la stabilité, à l’énergie, à l’efficience. En sport, il est admis que l’amélioration de la dynamique répercute sur l’économie du carburant et la performance des résultats. Les sciences sociales ont adopté le concept pour l’appliquer au groupe en indiquant leur vitalité. En droit, le terme n’est pas classique. Nous l’employons ici pour caractériser la relation vitale entre l’exercice de l’autorité et l’obéissance correspondante chez les consacrés[1]. Il nous permettre de nous représenter que plus elle est harmonieuse, plus la mission, au service de laquelle existe le binôme autorité-obéissance, attient son objectif. Ses déficiences aboutissent à l’insatisfaction ou résultats négatifs. 

Dans cette dynamique, trois modèles peuvent être identifiés : 1) l’autorité face à l’obéissance ; 2) l’obéissance face au l’autorité ; 3) l’autorité et l’obéissance côte à côte. 

Dans le premier modèle, l’autorité est mise en avant. Ici l’obéissance féodale nous sert de référence. L’autorité s’impose avec ses décors : insignes visibles, langage correspondant, appartenance ou création des cercles des autorités, retombés économiques ou honorifiques, protocoles, etc. Quelqu’un obéit par la force des choses ou par les circonstances de l’histoire et il n’est pas nécessaire qu’il comprenne pourquoi. Souvent, et pour les cas extrêmes, l’obéissance est entachée par le manque de liberté. 

Dans le deuxième modèle, l’obéissance prend le devant pour réclamer l’autorité en termes de protection, de sécurité. Celui qui obéit se situe dans un état de minorité d’âge permanente et se sent en insécurité. Le service de l’autorité ici prend le visage de paternalisme ou de maternalisme.
Quant au troisième modèle, l’autorité et l’obéissance marche côte à côte. Les concernés cherchent ensembles les voies et moyens pour atteindre les objectifs communs. Les fonctions sont différenciées et on cherche avant tout la participation de tous. Celui qui commande est en même temps obéissant. C’est le modèle qui répond aux aspirations des sociétés modernes influencées par la démocratie et les droits de l’homme. Le Code de Droit canonique ainsi que d’autres documents du Magistère s’inscrivent dans ce modèle comme nous aurons l’occasion de le préciser.

Cela dit, voyons comment le Code actuel considère ce service d’autorité et l’obéissance des religieux.


[1] Dans certains manuels de droit en général, on parle de « négoce », et tout ce que cela suppose de stratégies pour établir des relations justes et équitables entre personnes et institutions. Du point de vue positiviste, toute loi apparaît comme le résultat d’une négociation pour réguler un trafic des relations interpersonnelles ou entre institutions ou celles-ci avec des individus.

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