JOYEUX NOËL ET BONNE ANNÉE 2020

FELIZ NAVIDAD Y PROSPERO AÑO NUEVO 2020

NOHELI NZIZA N'UMWAKA MUSHA MUHIRE

samedi 7 avril 2018

LES DROITS DES CONSACRES ETUDIANTS DANS LE CODE DE DROIT CANONIQUE


Le sujet que nous nous apprêtons à considérer peut paraître surprenant et cela pour plusieurs raison. Pourquoi s’arrêter sur les consacrés étudiants alors que le Code prévoit des normes spécifiques pour les consacrés (cc. 573-746) ? Les consacrés étudiants sont-ils une communauté homogène pour identifier leurs droits spécifiques en tant qu’étudiants ? Et d’autres questions… Alors si une réponse claire ne peut pas être donnée, ne faudrait-il pas désister de traiter le sujet pour être non pertinent ? 
 
En effet, si nous nous arrêtons sur ce sujet c’est que, actuellement, nous nous mouvons dans le monde de la formation. Et la question m’a été posée par trois groupes différents sans aucune préalable consultation. Le Code de Droit canonique définit-il des droits des consacrés étudiants ? Sous une autre version, on m’a demandé si les consacrés étudiants ont-ils des droits ?

A première vue, la question est simple car il suffirait leur dire que tout le Code de Droit canonique les concerne. Et là nous  nous demandons si une telle réponse proviendrait de quelqu’un qui a saisi le fond de la question. Nous pensons que la demande veut une précision sur les droits spécifiques pour les consacrés étudiants. A la limite, la question cache un malaise des consacrés étudiants en rapport avec leurs supérieurs qui ne sembleraient pas reconnaître les droits que les consacrés étudiants revendiquent. Adressée au professionnel du Droit canonique, la question chercherait à mettre les points sur les i pour départager les uns des autres et savoir qui a tort ou qui a raison. Et dans ce cas, le tribunal constitué peut violer facilement le principe fondamental du droit moderne à savoir le respect du droit à la défense (c. 1620, 7º). 

Reconnaissant, toutefois, que la question mérite une réponse proportionnée, nous  nous sommes résolus à écrire cette page, non exhaustive certainement, en espérant que des contributions constructives y seront apportées à volonté. 

D’emblée, nous précisons que les consacrés étudiants ont des visages multiples ou disons mieux des statuts contrastés. Ne parlant pas des postulants, on peut reconnaître aux novices une certaine consécration pour les admettre dans le groupe. Rigoureusement parlant, les novices ne sont pas des étudiants mais ils sont en formation. Et souvent les préoccupations de leurs aînés sont nées pendant le noviciat ou bien avant. Et le groupe qui serait concernés, les consacrés étudiants proprement dit, serait celui des consacrés des vœux temporels et spécifiquement ceux qui sont aux études ou dans les maisons de formations avant l’émission des vœux perpétuels. Les contours de ce groupe n’est non plus uniforme car il y a des consacrés qui avant les vœux perpétuels sont en mission pastoral charismatique et non dans les maisons typiques de formation. Cela compte tenu des choix multiples des Instituts pour former leurs membres. Il n’est pas rare de trouver des consacrés de vœux perpétuels retourner aux études et l’on peut se demander si la question les affecte aussi. Enfin, comme la formation est un processus continu, on pourrait se demander si ceux qui sont en session de formation permanente sont aussi affectés. 

Laissant de côté la problématique d’inclusion et d’exclusion pour identifier les sujets concernés par la question, en admettant qu’il peut toujours y avoir des cas d’exception, on peut supposer que le noyau de la question concerne les consacrés étudiants de vœux temporels. Cela à cause de la perception qu’on se fait des évaluations pour être admis à l’étape suivante. Ceux qui évaluent sembleraient utiliser l’évaluation comme une arme redoutable pour établir l’espace des droits ou pas. Ceux qui la subissent se demanderaient alors si réellement le Code de Droit canonique leur accorde des droits. Leur demande est ouverte et nous aurons l’occasion d’y revenir. 

Abordant alors le fond de la question, nous disons que le renvoi à la lecture du Code de Droit canonique dans son ensemble ne serait pas une bonne réponse. On n’a pas le temps de tout lire et on ne sait même pas par où commencer. La raison même de ne pas emprunter cette voie est que le Code ni même la partie qui traite des consacrés ne parlent pas uniquement des droits et obligations des consacrés étudiants. Pour une réponse satisfaisante, il faut faire un tri et montrer d’abord l’esprit du Code de Droit canonique et la formulation positive de ce que les consacrés étudiants peuvent s’approprier comme droits les concernant. Quatre volets constitueront donc la réponse à la question posée : 1) le but du Code de Droit canonique qui définit le cadre des droits et devoirs des fidèles du Christ (y compris les consacrés étudiants) ; 2) les droits de tout fidèle dans l’Eglise ; 3) les droit et obligations des consacrés en particuliers ; 4) et quelques indications sur les droits et devoirs implicites dans quelques normes du Code. 

1. Du but du Code de Droit canonique. En promulguant le Code en 1983, le pape Jean Paul II avait indiqué dans la Constitution apostolique Sacrae Disciplinae Leges que le Code est un effort pour traduire en langage juridique les enseignements du Concile Vatican II. Et le Synode de 1967 qui prépara la révision du Code antérieur souligna que le nouveau Code devrait avoir un caractère éminemment pastoral. Dans le Code actuel ce but se perçoit clairement dans le dernier canon (le c. 1752) qui stipule que l’application du Code ne doit rechercher que le salut des âmes. D’ici on devine que tout ce qui met en relation les supérieurs et les consacrés étudiants ne peut que se situer dans la recherche droite du salut de tous.

2. Des droits des fidèles. Avant de se consacrer au Seigneur par la voie de la pratique des conseils évangéliques, on est fidèle chrétien. Ces droits demeurent s’ils n’entrent pas en conflit avec les droits spécifiques des consacrés. Sommairement, nous indiquerons ici ceux-là qui apportent une réponse à la question posée.
- le canon 208 : ici l’Eglise reconnait à tous les fidèles l’égalité en dignité et la diversité de fonction selon la condition de chacun. La dignité de chacun est un droit inaliénable des fidèles dans l’Eglise. La condition ou statut de chacun détermine son rôle ou action dans l’édification de l’Eglise. Le consacré de vœu temporel n’a pas le statut de devenir supérieur d’une maison religieuse, par exemple.
- le canon 209 : évoque le devoir de communion dans l’Eglise.
- le canon 210 : devoir de rechercher la sainteté.
- le canon 211 : droit et devoir de mission.
- le canon 212, §1 : devoir d’obéir et de respecter la hiérarchie.
- le canon 212, §2 : droit des fidèles de faire reconnaître leurs besoins.
- le canon 212, §3 : droit d’opinion selon la compétence.
- le canon 213 : droit de secours spirituel.
- le canon 214 : droit de rendre culte selon les dispositions du rite approuvé.
- le canon 215 : droit de fonder les associations.
- le canon 216 : droit de participer à la mission de l’Eglise.
- le canon 217 : droit à l’éducation chrétienne.
- le canon 218 : droit de recherche.
- le canon 219 : droit à choisir, et de ne pas être contraint à choisir, l’état de vie. Ici l’Eglise protège la liberté des enfants de Dieu. Cette protection affecte tous les actes juridiques des personnes physiques ou juridiques (c. 125). En d’autres termes, on peut voir ici le droit à être heureux.
- le canon 220 : droit à la bonne réputation. La diffamation est donc un délit dans l’Eglise.
- le canon 221 : droit à réclamer justice au tribunal et d’être jugé conforme à la loi. Ici le droit à la défense est assumé (c. 1620, 7º).
- le canon 222 : obligation de subvenir aux besoins de l’Eglise et promouvoir la justice.
- le canon 223 : obligation de tenir compte des droits des autres. 
Ces droits reconnus aux fidèles du Christ demeurent toujours quand on entre au couvent. On peut les évoquer s’ils n’entrent pas en collision avec les droits spécifiques des consacrés, à n’importe quel étape de leur vie : en formation ou en mission. On aura remarqué, en passant, que leur formulation est générique et qu’il faudrait une interprétation détaillée pour déterminer l’extension de chaque droit et voir concrètement quand cela affecte un consacré étudiant. Cela renvoi donc à une étude spécialisée de chaque droit évoqué ci-haut, ce qui déborde le cadre de notre réflexion. Qu’en est-il des droits spécifiques des consacrés ?

3. Des droits et obligations des consacrés en particulier. Dans le droit commun des consacrés, ces droits et obligations répondent à un chapitre comprenant les canons 662 à 672. Certains de ces droits et obligations débordent la considération classique et juridique du droit à exiger ou du devoir à accomplir. Cela parce que leur contenu déborde la dimension juridique pour se situer à d’autres plans comme la spiritualité ou la foi. Par exemple, les canons 662 et 663 : la suite du Christ et la prière. Si on réduisait la suite du Christ et la prière au négoce du droit d’échange, on les viderait de leur substance. Normalement quand vous payez le loyer d’un appartement ou d’un studio, le bailleur vous doit l’appartement ou le studio loué. Ce schéma de devoir-obligation ne fonctionne pas en parlant de la suite du Christ et de la prière. Ici on se situe à une autre dimension de foi, d’amour, de relation intime entre Dieu et le consacré. Il y va de son existence, de son être (cc. 573 ; 607). Cela dit, on peut relever les droits et devoirs des consacrés reconnus par le Code :
- le canon 662 : la suite du Christ selon les constitutions de l’Institut. Cela rappelle le canon 210 sur le droit de rechercher la sainteté de la part des fidèles.
- le canon 663 : droit et obligation de la prière : Eucharistie ; lecture de la Bible ; Liturgie des Heures ; culte marial ; retraite spirituel. Cela exige de l’Institut des espaces, des moyens matériels, du calendrier, etc. Et c’est de droit pour les membres d’en avoir.
- le canon 664 : droit au sacrement de Réconciliation.
- le canon 665 : droit et obligation de résider dans une maison religieuse (ce qui implique la nomination ou droit à être destiné à vivre dans une communauté précise).
- le canon 666 : obligation de se séparer du monde par l’usage  modéré des moyens de communication.
- le canon 667 : droit et obligation d’observer la clôture.
- le canon 668 : obligation de se séparer du monde dans la gestion des biens temporels.
- le canon 669 : obligation et droit de porter l’habit religieux, cela pour les membres des Instituts religieux et selon les prescriptions de leurs constitutions.
- le canon 670 : droit à recevoir le nécessaire de l’Institut en vue d’atteindre le but de la vocation.
- le canon 671 : obligation de se référer au supérieur légitime, et de recevoir de lui une autorisation, avant d’accepter une charge ou un office en dehors de l’Institut.
- le canon 672 : obligation à la continence, d’éviter ce qui ne convient pas à l’état des consacrés, de ne pas assumer des fonctions publiques, de ne pas gérer les biens des laïcs, de rechercher et maintenir la paix entre les hommes, de ne pas militer dans les partis politiques et d’y exercer des responsabilités, de ne pas faire le service militaire sans permission.
 - le canon 1179 : le droit aux funérailles dans l'église ou oratoire de l'Institut, célébrées par le Supérieur si l'Institut est clérical. si non par le chapelain.
Cette liste des droits montre, en effet et en grande ligne, ce que l’Eglise attend des consacrés et leur image dans le monde. Est-elle complète, exhaustive ? Nous ne le pensons pas mais, sans doute, elle reflète les préoccupations de la  hiérarchie pour une forme de vie structurée et disciplinée. En guise de complément, nous évoquons, dans la suite, les droits et obligations implicites dans d’autres canons du Code actuel.

4. Des droits et devoirs implicites dans le Code pour les consacrés étudiants. Dans ce paragraphe, nous ne saurions pas parcourir tout le Code pour relever les droits implicites des consacrés étudiants ; seulement nous allons nous limiter à quelques canons qui nous paraissent plus significatifs et pragmatiques pour le cas qui nous concerne.
- les canons 617 à 619 décrivent comment un supérieur consacré gouverne ses confrères ou consœurs. En grande ligne, le supérieur gouverne ses frères ou sœurs selon le droit, dans un esprit évangélique et de fraternité et dans le respect de la dignité de chacun. Ces recommandations ou obligations du supérieur dans l’exercice de sa charge sont des droits des frères et sœurs.
- le canon 657, § 2 fixe le délai maximal de vœux temporels à neuf ans. Ici la norme accorde au consacré plusieurs droits, entre autres : le droit à être formé dans un temps déterminé (l’Institut ne peut pas le considérer comme un mineur d’âge indéfiniment) ; le droit de jouir de tous les droits existant dans l’Institut une fois la formation achêvée et admis à la profession des voeux perpetuels : pleine participation dans la vie de l’Institut avec des droits y relatif ; le droit de pleine intégration si les conditions sont remplies.
- le canon 660, § 2, en voulant favoriser le rendement maximal du temps consacré à la formation, interdit les Instituts à confier des charges aux membres en formation. C’est donc un droit des consacrés étudiants à se consacrer entièrement à la formation.
- le canon 1341: établit  le mode de sanctionner dans l’Eglise et trouve un écho dans le cas qui nous concerne ici. Les consacrés étudiants sont des personnes pouvant s’égarer comme tout être humain. Avant de prendre la sanction, le canon exhorte le supérieur de tenter pastoralement à ramener le coupable au bon chemin. Ce canon est applicable aussi dans certaines figures de séparation d’un membre d’avec son Institut (cc. 689, § 1 ; 696).

Pour conclure cette page, on peut reprendre la question et se demander encore si nous avons apporté une réponse satisfaisante. Si nous restons dans le cadre du Droit canonique et que la question posée suppose que les droits à connaître sont ceux qui nous maintiennent dans les objectifs de la vie consacrée comme c’est la recherche de la sainteté, alors on peut espérer que la réponse a été trouvée. Imaginons, par exemple, que quelqu’un du groupe pose la question de ses droits à partir d’une vie consacré que lui-même essaie de se construire (ai-je le droit de posséder les choses comme les jeunes de ma génération ; pourquoi demander une permission au formateur ; etc.), dans ce cas la réponse ne lui sert à rien. Si la question a des liens lointains ou directs avec l'évaluation des formateurs et supérieurs, la réponse est de rester serein car le droit existe pour faire grandir les personnes et non vivre dans une peur permanente. Tous nous avons besoin d'être libre et heureux. La réponse que nous avons donnée supposait que nous partions tous du postulat du droit de la vie consacrée tel que l’Eglise nous le présente. En dehors de ce cadre, il se produit tout simplement un dialogue des sourds. Nous pensons sincèrement que ce n’était pas le cas. Parfois les formateurs, nous devons l’admettre, nous ignorons ce que l’Eglise a prévu dans l’exercice des droits des fidèles et des consacrés en particuliers. Ceux qui nous voient agir, parfois correctement, parfois maladroitement, s’étonnent et s’interrogent. L’humilité nous exigerait de reprendre le chemin du pèlerin et visiter le Code, voir les droits et obligations des uns et des autres. Et c’est ce que nous avons essayé de faire comme orientation. Merci pour enrichir le débat.

Père Pierre KAZIRI, O. de M.
Docteur en Droit canonique.




mercredi 15 mars 2017

VISION CHRETIENNE DE LA FAMILLE SELON AMORIS LAETITIA





Introduction[1].
Partant de Amoris laetitia, nous voudrions découvrir la vision chrétienne de la famille. Selon le dictionnaire Larousse de la langue française, une vision se comprend comme faculté de voir, comme une image mentale que l’on se fait d’une réalité et qui peut influencer un comportement (comme les images que les humoristes créent chez l’auditoire) ou une « manière de voir, de concevoir, de comprendre quelque chose de complexe », par exemple la vision du monde. Cette dernière définition de la vision nous rapproche de ce que nous aimerions comprendre comme chrétiens sur la famille. La vision chrétienne de la famille évoque donc notre manière de concevoir, de comprendre la famille en tant que chrétiens et plus précisément ce que notre hiérarchie, nos pasteurs nous enseigne, exhorte à saisir et vivre comme membre de la famille et cela par rapport aux autres visions possibles de cette réalité (vision païenne, musulmane, africaine, asiatique, etc.). La prétention de notre intervention est donc de démêler le blé de l’ivraie ou l’or, le diamant des gravât d’une carrière.
Étant donné que les sciences impliqués sont infinies (sociologie, philosophie, politique, économie, anthropologie, histoire, etc.), la tentation à se disperser s’accroit en voulant chercher à comparer les diverses visions possibles de la famille selon les cultures ou idéologies. Notre regard porte uniquement sur la vision chrétienne, plus précisément la vision de l’Église catholique, de la famille à travers les enseignements de nos pasteurs. Le choix de se limiter à l’enseignement de nos pasteurs est de ne pas se perdre dans les opinions mais de présenter la doctrine sûre vers laquelle nous devons nous orienter. Le point de départ est donc l’Exhortation apostolique post-synodale Amoris laetitia. Mais à vrai dire cette Exhortation est l’aboutissement de ce que notre Église perçoit de la famille aujourd’hui, une perception, une compréhension, une vision qui s’est forgé à travers des siècles.
Historique.
En effet, Amoris laetitia, même si elle apporte des nouveautés, le Synode dont il est le reflet a été fait par des hommes formés dans une vision chrétienne bien déterminée. Il convient donc de rappeler ce socle, ces fondations qui rendent Amoris laetitia intelligible.
Sans tarder et sans aller trop loin, nous rappelons en grande ligne l’enseignement ou la vision que l’Église garde sur le mariage depuis le Concile Vatican II, depuis ces derniers 50 ans.
1.    Dans Gaudium et spes, nous avons un résumé de la doctrine de l’Église sur la famille. Les numéros 47 à 52 sont fondamentaux. Noter que quand l’Église parle de la famille, du coup apparait le mariage comme son origine, sa naissance. Parler de la famille revient aussi à parler du mariage. S’attaquer à l’un, c’est aussi s’attaquer à l’autre.
Cela dit, la première et fondamentale considération que l’Église fait de la famille, c’est que celle-ci n’est pas une invention, une construction humaine. La famille a été voulue, fondée par Dieu, par le Créateur et fonctionne selon les lois fixées par Lui. La famille et le mariage qui l’engendre ne peut pas être assujettie à la fantaisie de l’homme. La famille est donc une institution qui relève de la volonté de Dieu. La famille existe quand un homme et une femme s’unisse par amour et dans la fidélité tout en étant ouvert à la procréation et l’éducation des enfants. C’est cette famille que le Christ a béni en faisant d’elle l’expression sacramentelle de son union avec l’Église : la famille chrétienne est le sacrement du Christ Époux de l’Église, son épouse (GS 48).
En lien avec cette vision, l’Église considère que la famille est un bien inestimable pour la santé de la personne et de la société humaine et chrétienne. La croissance de la société et l’éducation de la personne font partie des missions essentielles de la famille. La fidélité d’amour entre les époux et leur harmonie est un témoignage pour la société. Cela rend l’institution familiale toujours forte malgré les expériences négatives qui la jalonne comme la polygamie, le divorce, les unions libres, etc.
2.      Le premier Synode consacré à la famille après le Concile Vatican II nous donnera la synthèse de la vision ecclésiale de la famille à travers l’Exhortation apostolique post-synodale Familiaris consortio de saint Jean Paul II, en 1981. Tout le document est un joyau sur la nature, la grandeur, la beauté et la mission de la famille dans l’Église. Les numéros 11 à 17 de cette Exhortation nous résument solennellement le sujet que nous considérons. L’enseignement du Concile Vatican II par Gaudium et spes est repris et approfondi : la famille est inséparable du plan de Dieu d’entrer en communion avec les hommes. Ce plan de communion de Dieu avec les hommes atteint sa plénitude dans le Christ. Et le cœur de cette communion c’est le don de soi. Ce don de soi, pour une réalisation pleinement humaine, et cela dans l’ordre de la création, se concrétise uniquement soit dans le mariage soit dans la vie consacrée. La famille constitue le sacrement du don du Christ à son Église (FC 13). De la famille, on accède à la communion plus élargie : filiation, fraternité, famille humaine. En Dieu, la famille se découvre et découvre sa mission : communauté des personnes, service de vie, développement de la société, participation à la vie et mission de l’Église.
3.     Dans le sillage du Synode sur les laïcs, le saint Père Jean Paul II publia 1988 une réflexion sur la dignité et la vocation de la femme (Mulieris dignitatem, 15/8/1988). Une vérité fondamentale se dégage de ce document, à savoir que la maternité de la femme participe à l’alliance de Dieu avec les hommes. Cette maternité ne se réduit pas à la procréation mais comprend l’écoute et la conservation de la Parole de Dieu. Ici la femme est comprise en la situant dans le plan du salut de Dieu (MD, 19). Les visions instrumentales ou utilitaristes sont dépassées. La femme n’est pas là pour donner uniquement des enfants,  perpétuer l’espèce, accroitre la richesse, etc. On la comprend bien quand on se situe face à l’ordre de la création et du plan du salut de Dieu. Ce qui est dit ici n’est pas nouveau mais un approfondissement de l’enseignement qui vient du Concile Vatican II comme nous l’avons vu avec Gaudium et spes. Cela a un impact direct sur la famille, car si l’on préserve à juste titre la dignité et la vocation de la femme, la famille en sort enrichie. En d’autres termes, c’est la dignité et la vocation de la famille qui sont rehaussées, préservées.
4.      Après le Synode sur les laïcs, une Exhortation post-synodale Christifideles laici est donné par saint Jean Paul II, le 30/12/1988, juste après Mulieris dignitatem. Pour cette Exhortation, la famille fait partie des droits de l’homme (ChL, 38). Elle n’est pas donc une idée, une opinion, un concept. La famille est sacrée comme la vie. La famille est le berceau de la vie et de l’amour ; c’est dans la famille que l’homme naît et grandit. Elle est donc la cellule vitale de la société. La bonne santé d’une société dépend de la qualité humaine de ses familles.  En famille, l’homme se réalise comme personne dans sa dimension sociale. Par la famille, l’homme réalise son premier engagement social. La famille est donc une valeur unique et irremplaçable pour le développement de la société et de l’Église, elle-même. Elle est le noyau de base de la société. En protégeant la famille, on protège la société. Pour l’Église, l’avenir de l’humanité, et de l’Église qui en fait partie, passe par la famille (ChL, 40). La famille chrétienne est considérée par l’Église comme l’Église domestique (ChL, 47). Elle participe à l’édification du Royaume de Dieu dans l’histoire à travers les réalités quotidienne en rendant visible les fonctions prophétiques, sacerdotales et royales du Christ et de l’Église (ChL, 52). Par cette Exhortation, il ressort que la famille est le lieu théologique et pastoral de l’Église.
5.     De Rome (Italie), l’écho de la famille s’est fait entendre à travers nos pasteurs. Je parle du « Directoire de pastorale familiale et conjugale » de la Conférence Épiscopale Nationale du Cameroun (CENC), publié en 1981[2].
Au sujet de la famille, les Evêques du Cameroun rappelle que la bonne compréhension de la famille ne doit pas se limiter uniquement au noyau des époux et de leurs enfants mais intégrer l’importance de la famille élargie, la grande famille telle qu’elle est perçue dans la société africaine. Nos pasteurs considèrent que la famille est l’un des lieux où doit se réaliser en priorité l’évangélisation. Cela dit, la doctrine universelle est rappelée.
Comme le Directoire entend donner les orientations pastorales sur des problèmes que les pasteurs rencontrent sur le terrain, les solutions proposées font ressortir la vraie image de la famille dans l’Église du Christ au Cameroun.
Quelques exemples suffisent pour s’en rendre compte :
1. La formation. Les fidèles doivent être instruits sur le vrai sens de la famille : elle répond au plan de Dieu et le Christ l’a élevée au sacrement de son amour pour l’Église. La famille traduit l’alliance de Dieu avec les hommes. La famille chrétienne doit être le sel de la terre et la lumière du monde.
2. Face au mariage à l’essai qui ne tient pas compte ni du mariage coutumier ni civil mais cherche à tester si la cohabitation est possible, les pasteurs rappelle que la dignité de la femme ne permet pas de la convertir en objet d’expérimentation. L’amour des époux participe à l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ.
3. Face au mariage non sacramentel (coutumier, civil et sans la bénédiction de l’Église), ce qu’on désigne aussi comme cohabitation avant le mariage, les Évêques rappelle que le chrétien est intégralement, en même temps, fils ou fille de la coutume, du pays et de l’Église. Il n’est pas normal de vivre partagé comme si le chrétien était opposé à sa culture.
4. Concernant les unions libres qui ne répondent à aucune institution publique reconnu (c’est l’adultère ou concubinage de fait), les Évêques proposent d’éclairer patiemment les personnes qui vivent dans ces situations pour redécouvrir le visage de la famille chrétienne.
5. Face à la polygamie, l’Église croit dans la famille d’un homme et une épouse et cela pour toute la vie. Et la CENC propose comme attitude pastorale : l’accueil et l’accompagnement, pas de rejet. Très audacieux, la CENC propose aussi annoncer l’Évangile dans son intégralité aux polygames en leur proposant d’autres moyens pour accéder au salut comme la pratique de la charité et l’édification matérielle de l’Église locale (p. 85-86).
6. D’autres situations particulières touchant la famille sont évoqués (comme les femmes célibataires, les divorcés non remariés ou remariés, les sans familles, les veuves, les célibataires forcés, les ménages sans enfants, les mariages dont les époux ne partagent pas la même religion, etc.) et, dans ces cas, le regard de l’Église est l’appel à tous à la sainteté, à la liberté des enfants de Dieu, à la dignité de la personne, etc. La CENC considère que c’est une attitude négative de condamner pure et simplement. Comme pour les polygames, la pratique de la charité peut être une bonne solution (p. 89).
En 1999, la Commission épiscopale pour la doctrine de la foi de la CENC met sur pied, avec l’accord de Rome (Congrégation pour la Doctrine de la Foi), un guide pastoral pour le mariage catholique. Le document applique les normes canoniques en vigueur pour les cas particuliers et problématiques de mariages des chrétiens. Par exemple, pas de communion pour ceux qui vivraient en mariage civil sans mariage catholique. Dans tous les cas, polygamie ou divorcés remariés, si la situation est irrégulière pas de sacrement. Avec ce document, les orientations pastorales de 1981 sont recadrées. La vision de la famille chrétienne se renforce par le souci de nos pasteurs de sauver à travers la famille ses brebis par des propositions ou une pastorale adaptée.
Cela dit, nous pouvons nous rapprocher de Amoris laetitia et l’interroger sur sa vision de la famille chrétienne.
Contenu.
L’Exhortation apostolique Amoris laetitia que nous considérons est un aboutissement d’un long cheminement de réflexion de l’Église et que le Pape traduit en orientations pastorales de la vocation et la mission de la famille dans l’Église.
En effet, la genèse du texte remonte de deux Synodes célébrés sur ce thème de la famille.
1) En octobre 2014, il y eut la IIIème Assemblé Générale Extraordinaire du Synode sur « Les défis pastoraux de la famille dans le contexte de l’Évangélisation ». A la conclusion de cette Assemblée le pape François décide que les conclusions deviennent une référence pour préparer le Synode ordinaire sur la famille en 2015. Ce sera les lineamenta ou propositions de réflexion envoyé au monde entier pour préparer le Synode. En juin 2015, l’Instrumentum laboris ou synthèse des contributions et suggestions recueillies est disponible. Le document est remis aux Évêques pour une dernière observation avant le Synode.
3) Du 4 au 25 octobre 2015, ce sera le tour de la XIVème Assemblée Générale Ordinaire du Synode dont nous parlons. Le Synode se conclut par des Propositions qui sont soumis au Pape François et à partir desquelles il confectionne l’Exhortation que nous avons en main. Il est vrai que le Pape s’appuie sur ces travaux pour le texte final mais il garde sa liberté pour définir l’enseignement définitif contenu dans le document. Les fruits de ce Synode est l’Exhortation apostolique post-synodale Amoris laetitia publié le 19 mars 2016. Amoris laetitia est un document ecclésial et magistériel du Pape François.
Quelle vision de la famille rencontrons-nous dans Amoris laetitia (la joie de l’amour) ?
Ayant à l’esprit la doctrine et la pastorale antérieure aux deux derniers Synodes sur la famille, on peut déjà se faire une idée. Mais avant de répondre à la question, essayons de comprendre le contexte dans lequel ces Synodes ont été célébrés.
Trois points essentiels peuvent être rappelés : 1. Le débat sur les divorcés remariés et leur accès aux sacrements qui semble ne pas trouver une réponse définitive. Nous rappelons qu’en 1994, année de la famille, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (Rome) avait précisé sa position sur ce dossier. La norme canonique (CIC 83, c. 915) rappelant que ceux qui vivent dans un péché grave manifeste ne peuvent pas accéder à l’Eucharistie demeurera et demeure[3]. On sait dans la suite que le rappel de la norme a fait couler beaucoup d’encre. 2. Dans la société occidentale, un secteur de la société exige que l’institution matrimoniale soit revue en relation avec les libertés individuelles. La théorie du genre agit comme moteur de ces revendications. Des lois sont votées un peu partout et, pour les francophones, on se souviendra du débat sur le mariage pour tous dans l’hexagone. 3. La nouvelle Évangélisation. L’Église se rend compte qu’on ne peut prétendre évangéliser le monde si on délaisse la question de la famille. A ce sujet, les lineamenta évoquent des nombreux signaux de crise de l’institution familiale et l’importance que la famille revêt pour l’Église en ce moment de la nouvelle évangélisation (n. 2). Une radiographie de la situation familiale à travers le monde est établie (n. 5-10) : polygamie, familles brisées, exploitées, etc. Face à cela l’Église ressent la nécessité de dire une parole de vérité et d’espérance (n. 11). Le mariage et la famille qui en découle s’inscrit dans le projet divin du Créateur d’entrer en communion avec les hommes (n. 14). Les lineamenta rappelleront pour la cause l’enseignement de l’Église sur la famille dans ses documents conciliaire et autres. C’est la doctrine immuable de l’Église. Quel nouveauté alors pour célébrer un nouveau Synode ? S’agit-il de redire ce qui est déjà connu ? En suivant les travaux, les propositions et le document final on peut se rendre compte des lignes qui bougent et les fondements qui restent stables.
Dans les propositions que Synode ordinaire de 2015 soumet au Pape, la famille est présentée dans ses différentes formes actuellement : en tant que première école de l’humanité (n. 2), la famille revêt une importance particulière pour l’Église. La famille se comprend en rapport avec la création de la vie sur terre (n. 4). Elle est fondée sur le mariage de l’homme et de la femme et elle est le lieu magnifique et irremplaçable de l’amour personnel qui transmet la vie. Pour l’Église, le mariage est un signe sacré où l’amour de Dieu pour son Église devient efficace. La famille chrétienne fait donc partie de l’Église vécue : une “Église domestique”. En parlant de la famille, il est important de considérer aussi la famille élargie. Les liens familiaux maintiennent le monde en vie. Dans la famille, l’homme s’épanouit et contribue au développement de la société. Aujourd’hui la famille affronte des défis non négligeables comme la théorie du genre qui envisagerait une famille sans différenciation de sexe (n. 8), les conflits, les persécutions religieuses, les migrations, la pauvreté, le chômage, la précarité, les blessures, la solitude, la vieillesse, le deuil, les handicapés, les célibataires, la polygamie, la place des enfants, le rôle de la femme, la dimension de l’amour dans la famille, la fidélité, etc.
Devant les situations diverses, l’attitude de l’Église est l’intégration, l’accompagnement des familles. La doctrine est connu mais l’Église doit actualiser, renouveler son approche de la famille. Le principe directeur est d’accueillir les personnes avec compréhension et délicatesse dans leur existence concrète et savoir soutenir leur quête de sens. Dans l’optique de la foi, personne n’est exclu: tous sont aimés de Dieu et sont au centre de l’action pastorale de l’Église (n. 34). Dans des cas particuliers comme les cas de polygamie, l’accompagnement de l’Église est de considérer cela comme une opportunité pour enclencher un chemin de conversion. Il s’agit de faire résonner l’amour de Dieu au milieu de ces situations concrètes et particulières.
Recueillant ces propositions, le Pape François nous donne, dans Amoris laetitia, des orientations pastorales et magistérielles pour comprendre la famille, sa vocation et sa mission dans le monde. Le Pape François voit, dans cette Exhortation, une proposition aux familles chrétiennes, pour les stimuler à valoriser les dons du mariage et de la famille, et à garder un amour fort et nourri de valeurs, telles que la générosité, l’engagement, la fidélité ou la patience. Il voudrait aussi encourager chacun à être un signe de miséricorde et de proximité là où la vie familiale ne se réalise pas parfaitement ou ne se déroule pas dans la paix et la joie (n. 5). Le Pape ne recommande pas une lecture hâtive de Amoris laetitia, plutôt il trouve bénéfique une lecture approfondie, avec patience, morceau par morceau, ou la recherche en elle de ce dont on peut avoir besoin dans chaque circonstance concrète (n. 9).
C’est vrai, on ne peut pas lire Amoris laetitia comme un roman. Il est dense avec des thèmes variés. Mais aussi, il est facile à lire, accessible pour tous. Certains même pensent que c’est la grande nouveauté de cette Exhortation : la  nouveauté linguistique (Card. Christoph Schönborn). Le document est lisible, dit-il. Il est long mais concret, réaliste.
Quelles sont donc les nouveautés de Amoris laetitia compte tenue des documents magistériels antérieures ? Le n. 35-39 de Amoris laetitia tentent de répondre avec précision à cette interrogation : pas question de céder à la mode et renoncer aux valeurs familiales ; plutôt il faut un effort plus responsable et généreux pour présenter les raisons et les motivations d’opter pour le mariage et la famille, de manière à ce que les personnes soient mieux disposées à répondre à la grâce que Dieu leur offre. Pour cela il faut être humble et réaliste. Les méthodes antérieures ont montrés des limites (idéalisme excessive, abstrait, dogmatisme normatif, etc.). Nous devons changer de méthode : présenter le mariage comme un parcours dynamique de développement et d’épanouissement et non un poids à supporter (n. 37). L’intégration, le discernement et l’accompagnement, voilà les instruments de la nouvelle méthode d’approche aux familles par l’Église.
Cela dit, il serait une erreur pense que le modèle ou la vision de l’Église sur la famille a changé. Le Pape demande de changer de regard et cela dans la perspective évangélique de la miséricorde. Les choses ne sont pas si simple pour ranger d’un côté les familles régulières et de l’autre, les irrégulières. Tous nous avons un chemin de conversion à faire. L’accueil de l’autre devient alors fondamental. Il est contreproductif de s’installer dans la dénonciation stérile, mais prendre le courage d’aller à rencontrer des familles dans leurs situations concrètes et y annoncer l’Évangile du salut.
Pour des situations particulières qui exigent une attention pastorale particulière, Amoris laetitia recommande ne pas condamner, mépriser, rejeter. Il faut intégrer tout le monde à la lumière de l’Évangile. On doit aider chacun à trouver sa propre manière de faire partie de la communauté ecclésiale (n. 297).
Amoris laetitia ne constitue pas une législation nouvelle applicable à tous les cas. Elle est « un nouvel encouragement au discernement responsable personnel et pastoral des cas particuliers » (n. 300). Conscient que des interprétations erronées peuvent survenir, le Pape avertit :
Afin d’éviter toute interprétation déviante, je rappelle que d’aucune manière l’Église ne doit renoncer à proposer l’idéal complet du mariage, le projet de Dieu dans toute sa grandeur : « Les jeunes baptisés doivent être encouragés à ne pas hésiter devant la richesse que le sacrement du mariage procure à leurs projets d’amour, forts du soutien qu’ils reçoivent de la grâce du Christ et de la possibilité de participer pleinement à la vie de l’Église ». La tiédeur, toute forme de relativisme, ou un respect excessif quand il s’agit de le proposer, seraient un manque de fidélité à l’Évangile et également un manque d’amour de l’Église envers ces mêmes jeunes. Comprendre les situations exceptionnelles n’implique jamais d’occulter la lumière de l’idéal dans son intégralité ni de proposer moins que ce que Jésus offre à l’être humain. Aujourd’hui, plus important qu’une pastorale des échecs est l’effort pastoral pour consolider les mariages et prévenir ainsi les ruptures.
Effectivement, à l’heure d’interpréter Amoris laetitia, des excès ont été observés. Sans aller dans les détails, je relève l’intervention récente (février 2017) du Card. Müller, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, chargé de veiller sur l’orthodoxie de la doctrine affirmant dans une interview que Amoris laetitia ne contredit pas la doctrine traditionnel de l’Église sur le mariage[4]. Le Card. Müller rappelle que « l’on ne peut pas se référer seulement aux petits passages présents dans Amoris laetitia mais lire l’ensemble de l’Exhortation, en vue de rendre plus attractif pour la personne l’Évangile du mariage et de la famille. Ce n’est pas Amoris laetitia qui a créé une interprétation confuse mais quelques interprètes confuses à son égard. Amoris laetitia veut aider les personnes qui vivent dans une situation qui ne s’accorde pas avec les principes morales et sacramentaux de l’Église catholique et qui veulent surmonter cette situation irrégulière et qui ne doivent pas se justifier dans cette situation. »[5] Notons que le Card. Müller ne parle pas d’un professeur ordinaire de théologie qui interpréterait mal Amoris laetitia; il parle de certains pasteurs évêques. Il dit, en effet, que l’interprétation authentique passe par son dicastère et que les évêques ne peuvent pas changer la doctrine ni la norme de l’Église.
Conclusion.
Amoris laetitia que nous venons de considérer n’est pas tombés des nuages. A mon avis, il vient rappeler la doctrine de l’Église sur la vocation et la mission de la famille dans l’Église et dans le monde. Ce rappel puise dans les trésors de l’enseignement de l’Église sur la famille avant, pendant et après le Concile Vatican. Nous avons exposé ce que le Concile Vatican II et les documents postérieurs nous ont légué sur la famille. Et de là nous avons essayé d’entrer dans la cuisine pour voir la préparation de Amoris laetitia avec les deux Synodes de 2014 et 2015.
En lisant de près les enseignements de Amoris laetitia, on se rend compte que l’Afrique a eu un rôle actif dans les positions des Synodes et du Pape. Je me réfère à la considération de la famille en tenant compte de la famille élargie. Aussi, l’attitude d’accueil, de discernement et d’accompagnement ont été proposé longtemps avant par  l’épiscopat camerounais pour une pastorale similaire. Personnellement, je m’en félicite et je pense que tout africain doit être fier de cela. L’Afrique n’est pas seulement consommateur des modèles venus d’ailleurs. Elle a beaucoup à édifier le corps mystique du Christ. Elle n’est pas passive ; plutôt actif.
En terminant notre exposé, remarquons encore une fois que Amoris laetitia est diversement interprétée. Cela montre que le sujet est dynamique. On n’a pas tout dit, épuisé sur la famille. Chacun peut et doit apporter sa pierre à l’édifice. Il est bon qu’on en parle, toujours en gardant le sens ecclésial sans penser au vainqueur ni au vaincu. Les fondamentaux n’ont pas changé ni changeront car disait saint Paul, il n’y a pas deux évangiles : l’Évangile est une et la vérité ne se négocie pas.
Merci.

P. Pierre KAZIRI, O. de M.
Docteur en Droit canonique.



[1] Cette réflexion a été présentée aux jeunes en carrefour et animés par les Salésiens de Don Bosco le 4 mars 2017 à Nkolbison (Yaoundé-Cameroun).
[2] CENC, L’enseignement social des Evêques du Cameroun 1955-2003, Yaoundé, AMA, 2005, 57-101.
[3] CDF, Lettre aux évêques de l’Église catholique sur l’accès à la communion eucharistique de la part des fidèles divorcés-remariés, Rome 1994, n. 6.
[4] L’interview a été accordé le 1 février 2017, au journal « Il Timone ». Cf. http://www.uccronline.it/2017/02/01/il-card-muller-a-il-timone-non-e-amoris-laetitia-ad-aver-creato-confusione/
[5] Non ci si può riferire soltanto a piccoli passaggi presenti in Amoris Laetitia, ma occorre leggere tutto nell’insieme, con lo scopo di rendere più attrattivo per le persone il Vangelo del matrimonio e della famiglia. Non è Amoris Laetitia che ha provocato una confusa interpretazione, ma alcuni confusi interpreti di essa…. La Amoris Laetitia vuole aiutare le persone che vivono in una situazione che non è in accordo con i principi morali e sacramentali della Chiesa cattolica e che vogliono superare questa situazione irregolare. Ma non si può certo giustificarli in questa situazione