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NOHELI NZIZA N'UMWAKA MUSHA MUHIRE

samedi 3 avril 2010

Le droit des minorités et le Droit Canon

Le droit des minorités est-il synonyme du droit des vulnérables ? Que dit le Droit Canon sur la question ?

Dans l’histoire contemporaine, la question des minorités est devenue très sensible. Particulièrement la II ème Guerre Mondiale et les génocides du XXème Siècle (juif, arménien, rwandais, burundais, etc.) ont mis en relief la question des minorités ethniques, raciales et mêmes religieuses. Suite aux drames subis par ces minorités, les Etats se sont engagés à les protéger comme on peut le constater dans la Déclaration Universel des Droits de l’Homme (1948). En adoptant cette Déclaration, les Etats se sont engagés à bannir toute discrimination quelle que soit sa nature et couleur. La protection des minorités est fondamentalement due à leur vulnérabilité. Mais toutes les minorités ne sont pas nécessairement vulnérables. Les richards de ce monde sont minoritaires mais ils ne sont pas pour autant vulnérables. Le critère de vulnérabilité est donc incontournable pour comprendre le droit des minorités. Et c’est par ce critère que l’on peut se demander si l’Eglise, à travers le Droit Canon, s’est-elle aussi penché sur le Droit des minorités.

En parcourant le texte du Droit Canon, on ne trouve nulle part le mot minorité mais cela ne veut pas dire que leurs droits soient ignorés. On le sait bien, que le Droit de l’Eglise s’occupe principalement du salut des âmes (CIC 83, c. 1752). Mais dans le salut des âmes, le bien être humain est aussi envisagé. Comme l’a bien souligné le pape Jean Paul II, en publiant le Code de Droit Canon actuel (1983), le Droit de l’Eglise constitue un effort pour traduire en langage canonique les enseignements du Concile Vatican II sur la nature et la mission de l’Eglise. Et la source de ces enseignements c’est principalement la Parole de Dieu. Ainsi, chercher à savoir ce que dit l’Eglise sur le droit des minorités exige un regard sur les orientations bibliques correspondantes.

Dans la Bible, la question des minorités peut être appréhendée à travers le message fondamental de la fraternité, de l’amour universel prêché et vécu par Jésus-Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » ; « Dieu est amour ». Saint Paul explicitera cette vérité en indiquant qu’en Jésus-Christ, il n’y a plus « ni juifs, ni grecs, ni gentil ». Tous deviennent des frères et, par conséquent, la question des minorités ne se pose plus. Mais, par la nature pécheresse de l’homme, l’histoire montre que cette question persiste même dans les territoires majoritairement chrétiens. Le Droit de l’Eglise ne doit donc pas l’ignorer.

Comme l’objet de notre réflexion se rapporte sur le droit, il faut scruter davantage la Parole de Dieu pour plus de lumière sur cette question et voir après le point de vue du Droit. Le texte qui nous sert de point de départ est proposé dans la Liturgie des Heures pour le carême, samedi matin. Dans la prière se manifeste l’esprit de l’Eglise. Par la prière et la méditation de la Parole, la conscience de l’Eglise se forme. Et pendant le carême, c’est la préparation de la fête de Pâques qui est en vue comme reflet de la gloire du Christ et l’anticipation de la gloire de ses disciples. A Pâques, nous avons l’image de l’Eglise qui se dessine pendant le carême. Le texte, alors, dont il est question, dit ceci : « Lavez-vous, purifiez-vous, ôtez de ma vue vos actions mauvaises, cessez de faire le mal. Apprenez à faire le bien : recherchez la justice, mettez au pas l’oppresseur, faites droit à l’orphelin, prenez la défense de la veuve. » (Is 1, 16-17).

Pour le prophète Isaïe, la pratique de la justice et du droit s’inscrit dans la recherche du bien. Et ce bien se manifeste dans la considération des minorités, des vulnérables. Le prophète parle de la protection, du droit des orphelins, des veuves. Pourquoi, le prophète ne cite que les orphelins et veuves ? Il parle de ces deux groupes parce qu’il s’agissait des personnes extrêmement vulnérables. La situation précaire des orphelins est bien connue par tous. Les veuves, si l’on se situe à l’époque, devraient être des personnes ayant besoins d’une protection spéciale.

Aujourd’hui, chaque année et régulièrement l’Eglise médite ce texte pour redessiner son image. Le droit a beaucoup évoluer. La conscience pour les droits des minorités ou vulnérables aussi. Du coup, la liste des vulnérables s’est allongé : les orphelins toujours, les veuves, les personnes âgés, les malades, les handicapés, les albinos, les immigrés, les prisonniers, les esclaves, les toxicomanes, etc. Le Droit de l’Eglise envisage-t-elle une protection de ces minorités ?

Partant du fait que tout homme a droit à la vie, le Droit Canon a prévu des sanctions pour des délits contre la vie et la liberté de l’homme (CIC 83, cc. 1397-1398). Dans ces canons, la vie de l’homme, y compris celle des minorités, doit être respectée. Une attention particulière est portée au droit des personnes qui ne sont pas encore nées. L’avortement ou attentat contre la vie de ces personnes est sanctionné par une peine maximale dans l’Eglise : l’excommunication. Ici l’Eglise prend la défense des plus vulnérables : les personnes dans les premiers jours, mois de leur existence. Elles ne connaissent pas leur droit. L’Eglise, de la Parole méditée et en prière, réalise que ces personnes vulnérables ont besoin d’une protection particulière. A propos, il est curieux de voir que des Etats modernes, sensibles à la question des minorités, se fichent du droit des embryons et dépénalisent l’avortement. L’Eglise, oui, se soucient des veuves, des orphelins, des immigrés, des malades, des personnes non encore nés. Quand l’Eglise publie des enseignements ou instaure des journées spéciales à leur endroit, c’est pour conscientiser le monde sur les droits de ces minorités.

En considérant ces droits, il conviendra toujours avoir à l’esprit que le droit des minorités est liés au Bien, à la vérité. Personne n’ignore que des associations de couleurs diverses voient le jour partout. Et ces associations revendiquent souvent leurs droits comme des minorités. Par exemple, les gays et leur revendication du mariage. Comme minorités, leurs revendications semblent être légitimes. Mais, il ne faudrait pas seulement s’arrêter à des considérations subjectives. Dans le droit des minorités, le Bien objectif doit être perçu comme finalité. Si l’on perd la notion du bien, les vices peuvent être revendiqués comme des droits des minorités.

Le droit envers les orphelins, la protection des veuves, la protection des immigrés et des embryions que l’Eglise promeut est avant tout une quête du bien, un bien qui est le reflet de celui qui est le Bien. Et ce bien, les associations fondées sur des vices ne peuvent pas le revendiquer. Et l’Eglise ne peut pas promouvoir leurs droits.

Nous voyons donc que l’Eglise garde à cœur la question des minorités ou vulnérables. Son Droit et ses enseignements à travers de nombreux documents et dans les forums internationaux manifestent l’attachement de l’Eglise à la dignité de la vie humaine et par-delà la protection des minorités.

Dr Kaziri Pierre