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dimanche 30 décembre 2012

J’AI LU « POUR COMPRENDRE LE DROIT DE LA VIE CONSACREE »

(ISBN: 978-2-296-99395-2)
Ecrit par un religieux, je me suis approché de ce nouveau livre pour tenter de comprendre le mystère de ces hommes et femmes, beaux et belles, vigoureux et en bonne santé mais qui décident de tourner le dos aux choses qui nous préoccupent (pouvoir, sexe, richesses, etc.), pour être signe du monde à venir.
Comme l’indique le titre du livre, l’auteur explique, en s’appuyant sur les normes canoniques de l’Eglise, le droit qui réglemente la vie des consacrés. En effet, il est habituel d’entendre parler de droit civil, de droit commercial, de droit constitutionnel, de droit familial, de droit international, etc. L’Eglise aussi possède des normes qui régissent ses institutions : droit de l’organisation de l’Eglise, droit sur l’administration des sacrements, droit sur l’enseignement dans l’Eglise, droit des associations dans l’Eglise, etc. L’auteur, le Père Pierre Kaziri, dans ce livre sous nos yeux, se penche donc sur le droit de la vie consacrée. Mais qui sont les consacrés ?
En parcourant le livre, je me suis rendu compte que les lois de la vie consacrée nous présente aussi l’image et la nature de ces hommes et femmes qui se consacrent à Dieu. Le droit dont la mission principale est d’établir des relations de justice entre les membres d’une corporation donnée, ne se limite pas ici à organiser seulement ce secteur de la vie de l’Eglise ; il présente aussi le pourquoi et la place de la vie consacrée dans l’Eglise. Ainsi j’ai réalisé que pour comprendre le droit de la vie consacrée, il faut tenir compte de la théologie de la vie consacrée. Le livre du Père Kaziri réussit parfaitement à mettre en relief ces deux aspects, l’aspect théologique et l’aspect juridique, qui constituent l’édifice des normes de l’Eglise sur la vie consacrée. La théologie de la vie consacrée permet de comprendre le lien de ces hommes et femmes avec l’Eglise : la vie consacrée est un don à l’Eglise et les consacrés une offrande pour l’amour de Dieu et l’édification de l’Eglise.
En effet, dès le premier chapitre du livre, le lecteur est éclairé sur l’histoire et les dénominations des différentes familles des consacrés. Parmi les consacrés, nous avons des consacrés religieux et des consacrés séculiers. A leur côté, nous avons aussi les sociétés de vie apostolique. La grande majorité des consacrés que nous connaissons se retrouvent dans les consacrés religieux : les moines, les ordres, les congrégations, etc. Certains mènent une vie apostolique d’autres une vie semi ou exclusivement contemplative selon le charisme des fondateurs.
Partant de cette diversité, l’auteur nous permet de découvrir que le droit de la vie consacrée contemple ce mode de vie comme un don de Dieu et que sa place est au cœur de l’Eglise en tant que réponse à l’appel de suivre radicalement le Christ par l’édification de l’Eglise et le témoignage pour un monde à venir. Cela dit, l’auteur explique les relations que les religieux maintiennent avec les autorités de l’Eglise, les vœux à professer, le droit à observer pour qu’une congrégation puisse voir le jour, le mode d’exercice de l’autorité, comment l’on devient membres de ces familles religieuses, la gestion des biens économiques dans la vie consacrée, les normes sur l’exercice de l’apostolat, les règles à observer pour quitter ou être chassé de la vie consacrée, etc.
La force de ce livre est d’avoir réussi à embrasser d’un seul regard tous les sujets relatifs à la vie consacrée. Tous les aspects sont évoqués et analysés avec concision. On pourrait avoir peur de se plonger dans un monde étrange du droit avec un langage souvent trop technique. Cependant, l’auteur parvient à transmettre avec succès les réalités d’un monde complexe dans un langage accessible à tous sans toutefois renoncer à la rigueur d’une publication réellement scientifique. Si l’auteur a intitulé son ouvrage : Pour comprendre le droit de la vie consacrée, le lecteur remarquera que le titre peut aussi se formuler de la manière suivante : « Pour comprendre le monde des consacrées ».
Le livre n’est pas seulement destiné aux adeptes des sciences juridiques mais aussi à toute personne qui s’intéresse aux questions religieuses et en particulier au monde des personnes consacrées (ou religieux) en Afrique.
Par Kamwenubusa Prosper.

vendredi 15 juin 2012

POUR COMPRENDRE LE DROIT DE LA VIE CONSACRÉE

Dans cet ouvrage, fruit d’une longue expérience de vie religieuse, formateur et cultivateur de science canonique, vous découvrirez les éléments essentiels pour comprendre les diverses formes de la vie consacrée. L’ouvrage s’adresse à tous le monde : religieux et laïcs, chercheurs et lecteurs, canonistes et adeptes d’autres sciences, etc. Voici la couverture du livre :



Pour son acquisition, s’adresser à l’éditeur : http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=37444 ou à votre librairie. Référence ISBN : 978-2-296-99395-2.

jeudi 26 avril 2012

LES RELIGIEUX SONT-ILS DES LAÏCS ?


I.                  Introduction

De nos jours, avec la diversité des familles des religieux, de leurs activités et de la forme de se présenter au monde, plus d’un, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Eglise, se demande qui sont réellement les religieux. Pour les religieux prêtres, du fait de la présidence de l’Eucharistie et de l’administration de la Confession, ils sont habituellement ou presque exclusivement désignés par leur caractère sacerdotal. L’aspect religieux est souvent relégué au second plan. Ils sont des « Pères ». Quand aux autres religieux, une appréciation différente semble s’établir entre les hommes et les femmes. Les hommes religieux non prêtres semblent être invisible. Ce sont des « frères ». Quant aux femmes religieuses, compte tenu de leur nombre imposant, on leur reconnaît un statut particulier dans la société. Ce sont des « sœurs » et affectueusement des « mères ». Mais ce statut, en quoi se différencie-t-il de celui des laïcs ? Que dit le Code de droit canonique à leur sujet ? Y a-t-il unanimité au sujet de ce statut entre canonistes et théologiens ? La lecture du canon 207 du Code actuel et des autres documents du magistère ecclésiastique, notamment les textes du Concile Vatican II, suscite des débats tant pour les académiciens comme pour les concernés.  
En effet, dans son premier paragraphe, le canon 207 prescrit que « par institution divine, il y a dans l’Église, parmi les fidèles, les ministres sacrés qui en droit sont aussi appelés clercs et les autres qui sont aussi appelés laïcs ». Le paragraphe deux du même canon ajoute que « il existe des fidèles appartenant à l’une et l’autre catégories qui sont consacrés à Dieu à leur manière particulière par la profession des conseils évangéliques au moyen de vœux ou d’autres liens sacrés reconnus et approuvés par l’Église et qui concourent à la mission salvatrice de l’Église ; leur état, même s’il ne concerne pas la structure hiérarchique de l’Église, appartient cependant à sa vie et à sa sainteté ».
De cette norme, les religieux, surtout ceux qui n’ont pas reçu le sacrement de l’Ordre, se demandent si le Code leur fait justice en les assimilant aux laïcs. Du côté des théologiens comme du côté des canonistes, les positions divergent et on essaie de parcourir l’ensemble de l’enseignement de l’Église pour dégager une opinion commune sur ce sujet. La considération des religieux ou leur statut au sein du Peuple de Dieu, correspond-elle à la doctrine conciliaire du Vatican II ? Les religieux sont-ils des laïcs ? Qu’ajoute-t-il leur statut de consacré dans la configuration de l’Église ? Ces questions et d’autres qui reviennent souvent dans le débat sur cette question, vont constituer l’objet de notre attention dans les lignes qui suivent.

II.               Quelques considérations préalables.

En abordant ces questions, des préalables s’imposent pour émettre sur la même longueur d’ondes :
1.      Le canoniste comme le théologien réfléchissent à partir des textes de l’Église qui leur sont communs. Dans leur lecture des textes, ils font un effort de les rendre intelligibles. Leur méthodologie et point de vue, en dépit des émotions des auteurs et de leurs styles personnels, ne sont pas nécessairement identique avec possibilité d’aboutir à des résultats divergents. Le théologien voudrait rendre actuel le dépôt de la foi ; le canoniste veut garantir l’ordre ecclésial. Les deux ne s’oppose pas, ils se complètent (Mörsdof). Dans leur discours d’interprétation, chacun peut adopter le point de vue de justification (expliquer et défendre le contenu du texte) ou celui de bousculer les frontières, c’est-à-dire, de critiquer (ouvrir les nouveaux horizons vers des nouvelles expériences ecclésiales). Le destinataire du discours de l’un et de l’autre ne saurait pas être indifférent à ces nuances entretenues ou involontaires. Cela débouche inéluctablement à la possibilité d’un pluralisme théologique surtout dans les milieux académiques. Les divergences d’opinion ne signifient pas la rupture d’unité de foi.
2.      Quels sont les textes sur lesquels les théologiens et les canonistes fondent leurs arguments ? Fondamentalement le théologien de la deuxième moitié du XXème siècle à nos jours s’est donné et se donne comme point de départ de sa réflexion les textes du Concile Vatican II. Le canoniste se munit de sa bible qu’est le Code de droit canonique de 1983. Cette diversité de sources ne signifie pas la divergence et moins encore l’ambigüité de doctrine. En effet, le bienheureux Jean Paul II, en promulguant le Code actuel, a essayé d’exprimer le rapport qui existe entre les deux sources : le Code de droit canonique constitue un effort pour traduire dans un langage canonique l’ecclésiologie du Concile. Le Code de droit canonique, toute proportionnalité et caractéristique propre gardées, n’en est pas moins un document magistériel comme le sont les documents du Concile. Est-il dogmatique ? La question est intéressante car elle peut être transposée aux documents conciliaires et elle a même été posée sur la valeur de Lumen gentium dans sa totalité. Qualifié de Constitution dogmatique, certains pères conciliaires se sont posés la question de savoir si tout ce qui était contenu dans Lumen gentium devrait être tenu pour dogmatique. La réponse de sa sainteté Paul VI dans la Note Explicative Préalable a été que seulement les expressions qui par nature sont dogmatiques peuvent être considérées comme telles[1]. En lisant Lumen gentium, on doit se garder de rendre dogmatique ce qui ne l’est pas. Et dans le cas du Code, si la doctrine qui y figure fait référence au dogme, on peut considérer son expression comme attachant.
3.      Quand nous parlons ici des religieux, il s’agit de l’acception large que le terme avait généralement dans le Concile et qui reste dans le langage habituel et quotidien pour désigner les personnes qui s’obligent, dans une famille reconnue par les autorités ecclésiastiques, à la pratique des conseils évangéliques : chasteté, obéissance et pauvreté. Dans ce cas, le mot « religieux » désigne les membres de toutes les familles des consacrés par la profession des conseils évangéliques. En effet, pour les canonistes, le terme religieux est réservé aux membres des instituts religieux avec obligation de mener une vie en commun : les moines, les moniales, les ordres, les congrégations, etc. Les membres des instituts séculiers ainsi que ceux des sociétés de vie apostolique, même s’ils appartiennent à la vie consacrée, ne sont pas considérés strictement comme des religieux par le Code de droit canonique. Ici nous utilisons ce terme comme équivalant des consacrés.
Que dire alors de la question qui nous concerne ici ? Les religieux sont-ils des laïcs ?

III.           Le statut des religieux.

D’après le Concile Vatican II, le statut ou l’état de ceux qui professent les conseils évangéliques de chasteté, pauvreté et obéissance, ˗ donc l’état des religieux ˗, compte tenu de la constitution divine et hiérarchique de l'Eglise, ne se situe pas entre la condition du clerc et celle du laïc ; Dieu appelle des fidèles du Christ de l'une et de l'autre condition pour jouir dans la vie de l'Eglise de ce don spécial et servir à la mission salutaire de l'Eglise, chacun à sa manière (LG, 43 b). Dans ce paragraphe consacré à la  détermination du statut des religieux, il ressort que fondamentalement il existe dans l’Eglise deux conditions ou état de base : être clerc ou être laïc. De là, quelqu’un peut se sentir appelé à vivre le don de la vie consacrée. La vie consacrée apparait comme un complément d’une forme d’être ontologiquement dans l’Eglise : être clerc ou être laïc. Le fondement de cette doctrine est sacramentel : le Baptême et l’Ordre. Les deux sacrement impriment le caractère et établissent l’état du fidèle dans l’Église. La vie consacrée ne saurait pas changer cet état sacramentel des fidèles du Christ.
Cela dit, on peut trouver dans le même document du Concile Vatican II des expressions tendant à différencier les religieux des clercs et des laïcs. LG 30 laisse entendre que dans le Peuple de Dieu, les prêtres, les religieux et les laïcs sont à considérer au même titre d’égalité. Ici, la division tripartite des états dans l’Église semble un acquis. Et si l’ambigüité pouvait subsister, le numéro suivant (LG 31) précise que les laïcs sont des chrétiens qui ne sont pas membres de l'Ordre sacré et de l'état religieux sanctionné dans l'Eglise. Et ailleurs (LG 13 c), les Pères conciliaires indique que l’Eglise se forme à partir des fonctions diverses en son sein : soit à travers les charges ou ministères, soit par la condition et mode de vie comme l’est la vie consacrée. Ici, la vie consacrée n’apparaît pas comme un ajout aux états ontologiques et sacramentels des clercs et laïcs, plutôt elle est consubstantielle à la nature et à la vie de l’Eglise. Dans ce sens, on peut comprendre ce que dira plus tard le Pape Jean Paul II dans l’Exhortation apostolique post-synodale Vita consecrata, nº 3, que « la vie consacrée est placée au cœur même de l'Eglise comme un élément décisif pour sa mission, puisqu'elle ‘fait comprendre la nature intime de la vocation chrétienne’ ».
Rappelons que dans le Décret du Concile sur la rénovation de la vie religieuse (Perfectae caritatis), la question de se définir par rapport aux autres états dans l’Église n’apparaît pas. Seulement, le Décret montre que la vie religieux remonte des origines de l’Eglise au-delà de sa formalisation dans le désert au IIIème siècle (PC, nº 1). L’indication de la vie religieuse laïque (PC, nº 10) n’apporte pas plus de lumière au sujet qui nous concerne ici. Cela parce qu’on peut trouver des frères et sœurs qui professent les conseils évangéliques dans d’autres formes de consécration que le Décret mentionne.
Revenant à la norme du Code actuel évoqué ci-haut, la division tripartite des états de vie dans l’Église ne semble pas admissible. Un canoniste avisé comme W. Aymans dira que la vie consacré appartiendrait aux structures dans l’Eglise et pas aux structures de l’Eglise[2]. La différence est grande. Une structure de l’Eglise signifie qu’il est nécessaire pour son existence. Et une structure dans l’Eglise est circonstancielle (par exemple : une association des fidèles). Cette interprétation de la norme rencontre des résistances chez les théologiens comme chez les canonistes religieux (Bandera, OP ; G. Ghirlanda, SJ ; Agostino Montan ; etc.).
Ces derniers montrent que la norme reprend l’enseignement du Concile Vatican II (LG 43-47) mais que le Concile n’a pas fermé les portes à une compréhension plus juste de la place des religieux dans l’Eglise. Les Pères conciliaires n’ont pas prétendu à être des théologiens ni canonistes puristes mais des témoins de la conscience de la foi de l’Église[3]. Aux théologiens et aux canonistes d’approfondir le sujet. Ainsi A. Bandera dit que « l’état de vie religieuse ne s’ajoute pas, après un certain temps, à l’Église déjà constituée ; il n’existe pas non plus pour l’embellir ou l’enrichir… ; il naît avec l’Église et son futur est inhérent à elle »[4]. Quant à G. Ghirlanda, il affirme que ce qui n’était pas pleinement développé dans le Concile et qui était resté dans l’ombre est maintenant explicite[5].
Cela pour le statut des religieux. Différemment de ce statut, le Code de droit canonique, par le canon 588, essaie de définir le statut de la vie consacrée globalement considérée. Celle-ci n’est ni clérical ni laïque ; elle est ouverte à toutes les personnes conforme au charisme de chaque institut. En vertu de ce charisme, un institut peut être dit clérical ou laïque. Un institut est clérical quand il assume l’exercice d’un ordre sacré et est reconnu comme tel par l’autorité de l’Eglise. L’institut clérical peut avoir des membres non clercs. Dans un institut clérical, le gouvernement est assuré par les clercs. Si l’institut n’assume pas l’exercice de l’ordre sacré, il est dit laïque et le gouvernement peut être assuré indifféremment par les clercs ou par les laïcs membres de l’institut.

IV.           Quelques implications de cette question dans les normes du Code

Ayant déterminé le statut des fidèles qui appartiennent à la structure hiérarchique de l’Eglise et par institution divine (ou sont des clercs ou sont des laïcs), le Code de droit canonique en déduit des conséquences pratiques que nous aimerions relever dans la suite :
1.      L’exercice du pouvoir de gouvernement dans l’Eglise. Selon le canon 129,  au pouvoir de gouvernement qui dans l’Eglise est vraiment d’institution divine sont apte ceux qui ont reçu l’ordre sacré. Les laïcs peuvent coopérer selon le droit. L’attention porte ici sur la fonction de gouvernement. Dans l’Eglise, il existe aussi la fonction de sanctification et d’enseignement. Dans la fonction de gouvernement, on peut distinguer le pouvoir législatif, administratif et judiciaire. Le problème ici concerne le degré de coopération des laïcs dans l’exercice du pouvoir de gouvernement de l’Eglise. Le cas le plus cité de cette coopération est celui de nommer des juges diocésains laïcs, si la Conférence épiscopale le permet, avec possibilité d’être choisi pour former le collège (c. 1421, § 2). Toutefois, le juge laïc ne peut pas présider le collège[6]. Ici nous avons un des exemples  de la coopération des laïcs dans le pouvoir de gouvernement de l’Eglise. Le Code évoque aussi la possibilité de nommer des conseillers  laïcs du juge unique au canon 1428. Cette  manière de coopération peut s’étendre à d’autres formes de décision où les laïcs interviennent dans la formation de la prise d’une décision : consultation, expertise, membre d’un concile ou d’un synode. Notons que selon le canon 150, tout office comportant pleine charge d’âmes, dont l’accomplissement requiert l’exercice de l’ordre sacerdotal, ne peut être validement attribué à qui n’est pas encore revêtu du sacerdoce. Ainsi, un laïc, un frère ou une religieuse, ne peut jamais être désigné curé d’une paroisse. La situation considérée par le canon 517, § 2 permet la participation à l’exercice de la charge pastoral avec un curé prêtre comme modérateur. Selon le canon 546, pour être nommé validement vicaire paroissial, il faut être constitué dans l’ordre sacré du presbytérat.
2.      L’exercice du pouvoir de gouvernement au sein des instituts de vie consacrée. Selon le canon 134, les Supérieurs majeurs des instituts religieux cléricaux de droit pontifical et des sociétés cléricales de vie apostolique de droit pontifical, sont des ordinaires et possèdent au moins le pouvoir exécutif ordinaire. Dans ces instituts et sociétés, selon le Décret Clericalia instituta de la Congrégation pour les Religieux et les Instituts Séculiers (27/11/1969), les frères non clercs ne peuvent pas exercer la charge de supérieur ou vicaire général, provincial ou local. Mais peuvent être des conseillers à tous les niveaux. En conformité avec le canon 129, le pouvoir exécutif ordinaire revient aux clercs dans ces instituts. Dans les autres instituts (de droits diocésaines et les instituts féminins), ce pouvoir revient à l’Ordinaire selon le droit commun et le droit propre. Par exemple, tout ce qui relève du droit pénal dans ces instituts est traité par l’Ordinaire du lieu, excepté les cas réservé au Siège Apostolique. Le pouvoir que les supérieurs possèdent dans ses instituts, que dans le passé était désigné comme un pouvoir domestique, est un pouvoir ecclésiastique et public mais n’ayant pas la force de pouvoir de régime dont il est question dans le canon 129. Comme on peut le constater la distinction de statut, clercs-laïcs, joue beaucoup dans l’acquisition et l’exercice du pouvoir au sein des instituts.
3.      Autres considérations du statut des religieux. Concernant ces considérations, nous admettons qu’une étude approfondie est encore à faire. Nous relevons ici quelques faits où la considération du religieux est pratiquement absente, ce qui renvoi à la considération bipartite du statut des religieux. Dans le droit sacramentaire, la considération des religieux est absente. Les ministres des sacrements sont considérés en vertu de leur sacerdoce ou non. Un exemple parmi tant d’autre est celui du ministre extraordinaire pour la distribution de la sainte communion. Pour ce ministère, on parle des laïcs, sous-entendu que les religieux non prêtres se reconnaissent dedans. En dehors du droit propre des religieux, ˗ troisième partie du deuxième livre du Code ˗ la considération des religieux comme une catégorie des fidèles avec un statut propre n’apparaît pas. Dans ce cas, le livre sur les sanctions dans l’Eglise en est une illustration. Uniquement, en cas d’attente de mariage par un religieux de vœux perpétuels, une sanction spécifique est évoquée. Pour le reste, les religieux non prêtre sont considérées comme des laïcs. On pourrait se demander si les religieux bénéficieraient encore des privilèges dans l’Eglise comme une marque de leur distinction avec les laïcs ? Comme dans le Code actuel la norme du Code antérieur qui établissait que les religieux, même laïques et novices, jouissent des privilèges des clercs (CIC 17 c. 614) n’a pas été retenue, il serait difficile de soutenir que les religieux ont un statut propre à partir des considérations d’ordre social dans l’Eglise. Cela ne veut pas dire qu’ils n’ont pas un rôle propre à jouer dans l’Eglise. Et ce rôle, à notre avis, garde un lien avec le charisme de la vie consacrée dans l’Eglise. Les différents charismes de vie consacrée manifestés par les divers instituts dans l’Eglise contribuent à l’édification de l’unique corps mystique du Christ. Dans cette vision, la question des statuts peut se révéler même peu significatif.

V.               Conclusion

Au terme de cette analyse, que pouvons-nous retenir ? Les religieux sont-ils des laïcs ? Si l’on s’en tient au langage ordinaire, les religieux ne sont pas des laïcs. D’ailleurs, c’est très rare que deux mots appartenant à une même communauté linguistique soient synonymes. L’histoire de l’Eglise est plein d’anecdotes pour confondre les laïcs et les religieux. Toutefois, sur un autre plan, comme celui de l’organisation et des structures de l’Eglise, les mots acquièrent des significations métalinguistiques et les religieux peuvent être considérés ontologiquement comme des laïcs par absence de la réception du sacrement de l’Ordre. C’est à ce niveau de compréhension que le canon 207 du Code de droit canonique répartit les religieux entre clercs et laïcs. Selon le Code actuel, il convient de dire que parmi les fidèles du Christ, ceux qui s’obligent à la pratique des conseils évangéliques sont des prêtres religieux et des laïcs religieux. La condition de prêtre et de laïc, fondé sur les sacrements qui impriment un caractère, passe avant celui de consécration dans la vie religieuse. Cette dernière est considérée comme un approfondissement de la consécration ontologique sacramentelle du Baptême ou de l’Ordre. Peut-être, le jour où la profession des vœux dans la vie consacrée deviendra un sacrement imprimant le caractère, un pas de plus aura été réalisé pour résoudre un des aspects de la question des statuts dans l’Eglise.
Pour conclure cette considération, un regard sur le numéro 41 de Lumen gentium de Vatican II peut nous apporter davantage une lumière. La raison d’être des religieux dans l’Eglise s’inscrit dans la recherche de la sainteté, de la perfection. Le numéro 41 reconfigure les possibilités de cette recherche. Pour atteindre la sainteté, les voies à emprunter sont diversifiées que la question de statut passe au second plan. Il n’y a pas un clerc ou un laïc comme figure homogène ; il y a des clercs (pasteurs, prêtres, diacres) et des laïcs (parents, célibataires, ouvriers, prisonniers, enfants, malades, etc.). Si chacun de ses figures recherche la sainteté comme le font les religieux, combien des statuts devrions-nous compter dans l’Eglise ? Nous pensons que l’essentiel n’est pas dans les statuts à accorder à tel ou tel groupe avec des privilèges que la question soulève mais la recherche effective de la sainteté qui est un appel adressé à tout le monde (LG, nº 40). 

Pierre Kaziri
Docteur en Droit canonique.



[1] Selon Severino Dianich, en s’inspirant de M. D. García Hervas, cette Note n’avait pas pour but d’éclairer une doctrine que dans le Concile serait resté obscure mais pour éviter des interprétations qui pourraient s’avérer déviantes. Voir son article : « La missione della Chiesa, i laici e la sacra potestas : una riflessione teologica », dans I laici nella ministerialità della Chiesa (Quaderni della Mendola), Glossa 2000, 47-48
[2] Voir son article : « La Iglesia en el Codex. Aspectos eclesiológicos del nuevo Código de la Iglesia latina », in Burgense 26, 1985, 222
[3] Voir Severino Dianich, art. cit., p. 58.
[4] Voir son article : « Eclesiología de la vida religiosa. ¿Hacia un retroceso? », in Angelicum 66, 1989, 577-602.
[5] Voir son article : « Vita consacrata », in Dizionario degli Istituti di Perfezione, Roma 1974, 357.
[6] Cf. Signature apostolique, Réponse du 30/10/1997 (Prot. nº 26882/96)